L'ostéopathie est-elle une pseudo science ? Les reproches envers l'ostéopathie décryptés
L'ostéopathie est souvent décriée. Pour la communauté scientifique, il n'existe pas ou très peu de preuve de l'efficacité de cette approche thérapeutique. Celle-ci la décrit même comme n'étant pas plus efficace qu'un placébo. Elle est souvent qualifée de "pseudoscience" ou de "fake medecine". Mais l'ostéopathie trouve pourtant un franc succès auprès du public : 86% des français font confiance à l'ostéopathie et consultent régulièrement d'après le sondage Odoxa de 2024.
Alors comment expliquer ce contraste ? La médecine conventionnelle est-elle trop dure ou les français prennent-ils des risques ? Comme souvent la réponse est nuancée.
Voici, ce qui est repproché à l'ostéopathie, avec interprétation.
1. Manque de preuves scientifiques solides :
VRAI, mais les études scientifiques sur l'ostéopathie sont très complexes à réaliser...
Si on veut valider la mise sur le marché d'un médicament, on l'administre à un groupe de personne et on note les effets. Même médicament, même recette (molécule) à tout le monde. Mais si on veut valider l'ostéopathie, il faut valider un ensemble de techniques, qui ne sont pas standardisées car elles sont fonction de chaque patient, et de chaque ostéopathe...
Des études ont démontré qu'une manipulation lombaire ne réduisait pas les douleurs lombaires. Mais pour soulager, l'ostéopathe ne traite pas que les lombaires, loin de là ! Il faudrait alors laisser le choix des techniques au praticien et vérifier s'il y a un impact sur la douleur après (des études l'ont fait et montrent un léger mieux, statistiquement significatif).
Il est difficile de faire un groupe témoin en ostéopathie, un groupe "placebo". C'est à dire qu'une groupe va recevoir des soins ostéopathiques tandis que l'autre aura eu un faux traitement, l'ostéopathe aura juste posé ces mains sans rien faire. Alors que cette méthode est facile à réaliser pour un médicament (un groupe prend le médicament, et un autre de faux médicaments, vides) il est difficile de savoir si on a reçu le traitement ou non. Alors qu'en ostéopathie, le sujet peut vite savoir qu'il n'a pas eu de traitement, le groupe traité sentira bien les techniques (mise en tension, travail articulaire...).
Mais ce n'est pas tout, car l'ostéopathe donne des conseils aussi essentiels que la séance pour avoir des résultats dans le temps. Et pour finir, l'ostéopathie agit en prévention ! Si une douleur est liée à des tissus déjà usés, oui l'impact de l'ostéopathie est réduit, il faut agir en médical. Mais en prévention, l'ostéopathie permet d'éviter que les tissus ne parviennent à ce niveau d'usure, ils sont d'abord en tension, il y a des blocages articulaires, mais pas encore de douleur. Mais là, les études devraient suivre des populations sur des années, certaines avec et d'autres sans intervention ostéopathique. Et comment évaluer quelque chose qui n'est objectivé que par les mains ? Comment évaluer que quelque chose n'est pas arrivé ?
Les études scientifiques sont donc complexes à mettre en oeuvre sur l'ostéopathie à cause des nombreux facteurs sur lesquels l'ostéopathie agit, par sa méthode qui est manuelle et donc sans outils, et à cause de son rôle préventif. Cependant, il existe bel et bien des études, peu nombreuses et plus ou moins bien menées, qui démontrent tout de même l'efficacité de l'ostéopathie.
2. Approches pseudoscientifiques
VRAI ET FAUX ! L'ostéopathie se base sur l'anatomie et la physiologie. Mais de vieux enseignements bien moins sérieux persistent chez certains ostéopathes.
A l'heure actuelle, il n'y a normalement pas de doute à avoir. L'ostéopathe se repose sur l'anatomie et la physiologie, il explique ce qu'il fait, pourquoi il le fait et doit être compréhensible. Il peut vout montrer sur des schémas les muscles, les ligaments, expliquer ce qui vous fait mal et expliquer le mécanisme de son action (réactions musculaires aux techniques par exemple). On ne doit pas ressortir de chez l'ostéopathe sans avoir compris ce qu'il a fait.
Les approches pseudoscientifiques semblent souvent tirées par les cheveux (flux cérébraux, énergétique, quantique...) mais quelques unes peuvent toutefois trouver un certain sens. Certaines approches très douces comme l'approche crânienne, sont très critiquées chez les professions de santé. Mais l'ostéopathe étant le seul à agir avec beaucoup de finesse dans le toucher, il est possible qu'il soit le seul à ressentir certaines tensions, inconnues par d'autres. Il travaille dans une dimension plus fine que lorsqu'on parle de tendinite ou de déchirure. Reste à savoir si l'ostéopathe est de bonne foi en travaillant réellement en lien toujours avec de l'anatomie, ou si d'autres sont moins rigoureux dans leurs explications.
Il est compliqué de savoir quels ostéopathes se basent encore sur des principes douteux. Il faut alors se renseigner à l'avance, écouter les recommandations et pendant la séance prendre du recul sur les explications données, pour se demander si elles semblent plutôt fiables ou plutôt bancales... Il est aussi du rôle de l'ostéopathe de dire ce qui est prouvé et ce qui ne l'est pas.
3. Formations hétérogènes, insuffisantes
VRAI ! Jusqu'à 2014, la formation en ostéopathie n'était quasi pas encadrée. Les écoles pouvaient délivrer un diplôme d'ostéopathe avec une formation insuffisante, parfois en seulement 3 ans ! Il existait près de 70 écoles en France alors que ce nombre a été réduit de moitié ces dernières années.
Heureusement avant cette date, certaines écoles dispensaient déjà une formation poussée et exigeante, sur les matières fondamentales (l'anatomie, la physiologie, les pathologies du système musculo-squelettique, l'oncologie, l'obstétrique etc...) avec l'intervention de médecins et autres professionnels de santé. Ce sont sur ces écoles que se sont basés les textes encadrant la formation en ostéopathie. Elles délivrent alors une formation sérieuse, qui permet aux ostéopathes diplômés d'avoir une prise en charge de qualité. Les soins sont alors fiables par la dimension scientifque sur laquelle se basent les techniques et la sécurité des patients est assurée car ils seront réorientés vers un médecin si des signes le demandent.
Il faut donc regarder la formation de l'ostéopathe, une école aggréée et qui forme en 5 ans est normalement un gage de sécurité.
4. Risque de retard de diagnostic
FAUX ! L'ostéopathe DOIT faire un diagnostic d'exclusion et DOIT réorienter si nécessaire !
L'ostéopathe porte une attention systématique aux symptômes en présence, pose les questions et réalise des tests si besoin afin d'écarter toute pathologie qui nécessiterait en première intention une prise en charge médicale.
Les délais de prise de rendez-vous chez un ostéopathe sont très court (ostéopathes nombreux) ! Alors on peut même accélérer le diagnostic : si un ostéopathe repère quelque chose d'urgent, il agira et fera ce qu'il faut pour qu'un patient soit pris en charge plus vite (courrier, appel...).
On dit cela de l'ostéopathie car parfois elle se dit "alternative", comme si on pouvait essayer l'ostéopathie à la place de la médecine conventionnelle. Mais non, elles sont complémentaires : là où agit l'une, l'autre agit ailleurs. En aucun cas l'ostéopathie ne traite quelque chose qui est traité en médecine, elle complète la prise en charge, comble les lacunes du traitement conventionnel.
5. Potentiellement dangereuse
Selon les techniques !
Il est reconnu que certaines manipulations pouvaient êtres dangereuses, même si les accidents suite aux manipulations sont tout de même peu répandus.
Les techniques ostéopathiques ne sont pas toutes des manipulations, il y a aussi des mobilisations, des étirements, techniques indirectes... Alors que certains ostéopathes ne font parfois aucune manipulation d'autres ne font que ça... Donc certains ne seraient pas du tout dangereux.
Il faut se renseigner sur la méthodologie de l'ostéopathe si ce point freine à la consultation.
6. Coûteuse
FAUX, au contraire !
Si l'on imaginait que la sécurité sociale rembourse une séance d'ostéopathie par an pour tous les français en avançant que c'est aussi et surtout pour la prévention de l'apparition de douleurs musculo-squelettiques, et bien l'ostéopathie pourrait même bien réduire les dépenses.
Pour quelqu'un qui s'est coincé le dos sans raison au travail ou à domicile, la sécurité sociale va certainement devoir payer des médicaments, un arrêt de travail ou même plusieurs avec le temps, des séances de kiné... Et cela côute pour une personne plusieurs milliers d'euros !
Alors que si un travail préventif est réalisé une fois par an en ostéopathie, que les tensions sont corrigées chaque année, et surtout : que les conseils sont donnés pour même agir AU QUOTIDIEN, sans dépense non plus, pour compenser les contraintes subies au quotidien. Les dépenses pourraient bien être fortement réduites concernant le mal de dos, les douleurs cervicales, lombaires, hernies, discopathies etc... Et cette personne ne se serait peut être jamais coincé le dos.
Conclusion : L'ostéopathie est-elle fiable ?
C'est donc en résumé un peu la question du bon et du mauvais ostéopathe...
Un ostéopathe peut avoir eu une formation insuffisante, se reposer sur des concepts non scientifiques, utiliser des techniques réputées dangereuses sans expliquer son axe de traitement, ne pas faire de diagnostic d'exclusion avant de prendre en charge certaines douleurs, ne pas réorienter car il cherche à traiter quelque chose qui nécessiterait une prise en charge médicale, empiéter sur le travail des autres professionnels et proposer tout un tas de séances d'ostéopathie sans donner de conseils qui suffiraient à prévenir et limiter la douleur.
Et pourtant, ce praticien est ostéopathe D.O au même titre qu'un autre praticien qui a suivi une formation plus rigoureuse, qui prend le temps de poser les questions et de faire les tests nécessaires, qui réoriente si besoin vers un médecin ou un autre professionnel en facilitant même le diagnostic médical, qui se base dans sa pratique sur l'anatomie et la physiologie, qui utilise des techniques non dangereuses, avec soin et écoute, qui explique ce qu'il fait par la physiologie articulaire, musculaire et les réactions connues du corps humain, qui donne des conseils et des explications pour que le patient comprenne le traitement et les facteurs qui donnent des douleurs, afin de réduire au maximum les dépenses santé dans les séances, les médicaments, les arrêts de travail, donc qui agit pour la prévention.
Les séances d'ostéopathie sont inégales selon les praticiens qui exercent. Il serait même possible que les études scientifiques se heurtent tout simplement à cette hétérogénéité de pratiques.
Tristan FORTUNATO, Ostéopathe D.O à Lyon 8